Sarkophage revient sur l'entretien accordé à Libération, dans son édition du 23 décembre 2005. Ce billet va avoir un petit frère, car l'entretien est très riche en même temps qu'il est musclé. Il faut dire que rarement les journalistes osent poser de vraies questions aux politiques. Quand ils le font, l'homme politique est fort dépourvu, qu'il en soit ainsi advenu.
L'entretrien est en Arial, les questions des journalistes sont soulignées. Sarkophage commente en Times, et place des liens pour que le lecteur puisse avoir un autre regard sur les déclaration du petit sinistre de l'intérieur, passablement agacé par une affiche qui montre, peut-être, son vrai visage.
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Que pensez-vous de l'affiche d'Act Up sur les murs de Paris qui reproduit une photo de vous avec le slogan «Votez Le Pen» ?
Cette affiche est directement inspirée des méthodes du Front national. Cela porte un nom : l'amalgame. On ne dénonce pas l'extrémisme en étant soi-même extrémiste et en cédant à la pratique systématique de l'amalgame. Voilà ce que je dis aux dirigeants d'Act Up.
Bien mal en prend au petit Nicolas Sarkozy ! Parler d'amalgame quand dans son parti on fait souvent pire que l'original (Le Fhaine) c'est un peu culotté ! Sarkophage pense à Balkany, Vanneste, Grosdidier, Druon et Sarkozy lui-même. Et cerise sur le gateau, Fillon, qui a été le copain de tous les ambitieux de droite, qui dit, en octobre 2002, porté par la victoire de la droite : "il ne faut pas oublier la responsabilité du front populaire dans l'effondrement de la nation française en 1940". Si ce n'est pas un amalgame douteux, Sarkophage n'y comprend plus rien.
Donc l'extrémiste, c'est vous ?
Ne faites pas semblant de ne pas comprendre. Je ne pense pas que l'on ait le droit de s'opposer avec des méthodes pareilles. Pour ma part, je ne me mets pas dans le camp des extrêmes. Jamais personne ne m'y a mis, d'ailleurs.
Comme il manque de place pour ajouter des liens, Sarkophage vous invite à lire ce que pensent : Pierre Perret, Luc Besson, José Bové, De Villiers, des éditeurs scandalisés par sa censure, La chèvre Jack Lang, Chirac dernier roi de France, Kassovitz ... La liste est encore longue, vous pouvez vous reporter à la rubrique : ce qu'ils pensent du petit Nicolas
Est-ce que vous n'avez pas parfois honte de votre manière de réagir aux événements sans aucun recul, et parfois sans beaucoup de réflexion ?
Est-ce une question ou une déclaration militante ? Venant d'un journal dont le manque de recul est une caractéristique, je pourrais prendre votre question comme un hommage ! Pour le reste, je suis un républicain scrupuleux, sans doute moins sectaire que vous.
Vous avez en direct un hôpital qui se moque de la charité ! Si Sarkozy est un républicain scrupuleux, Sarkophage est un apologue du sarkozysme ! Sarkozy a des références qui sentent très mauvais, et il cumule tellement de fonctions républicaines ...
Vous êtes ministre, pas journaliste...
Le fait d'être ministre ne vous disqualifie pas en tant qu'être humain. Comment pouvez-vous dire une chose aussi outrancière ? Alors que j'ai été le ministre de l'Intérieur qui a connu vingt-cinq nuits d'émeutes et que, à la différence de tous les pays qui ont connu ça, il n'y a eu ni morts ni blessés graves. Et que tout le monde, y compris votre journal, a noté la maîtrise des forces de l'ordre. Je ne crois pas qu'on puisse croire que les forces de l'ordre aient pu être maîtrisées par un ministre qui ne serait pas maître de lui-même. Il y aurait contradiction. Depuis quatre ans, j'ai porté des débats qui, dans nombre de cas, étaient en opposition frontale avec les thèses du Front national. Le FN, par exemple, se bat sur le thème de l'immigration zéro. Je n'ai jamais défendu cette thèse. J'ai défendu les quotas d'immigrés, c'est-à-dire une immigration positive. Je suis l'homme politique en France qui s'est le plus battu pour la discrimination positive. C'est une idée nouvelle qui est exactement le contraire de l'idéologie véhiculée non seulement par l'extrême droite, mais aussi par une partie de la droite. [...]. Et vous osez dire que je devrais avoir honte ? C'est vous qui devriez avoir honte de poser une question aussi contraire à l'objectivité la plus élémentaire.
Quand un journaliste fait son travail, il n'est plus objectif ! Quelle belle vision de la démocratie et du pluralisme !
Tout cela, personne ne vous le conteste. Mais quand vous parlez de «racaille» en vous rendant à Argenteuil, n'est-ce pas une réaction qui manque de recul ?
L'émission Arrêt sur images de Daniel Schneidermann a démontré les choses. Quand j'arrive à Argenteuil, c'est une personne qui me dit depuis le premier étage, une personne maghrébine par ailleurs : «M. Sarkozy, débarrassez-nous de ces racailles, on n'en peut plus, on a peur.» Et je réponds : «Oui, madame, faites-moi confiance, on va vous débarrasser de ces racailles», visant les gens qui lançaient des tessons de bouteille et autres projectiles. Je ne vois rien qui soit si peu que ce soit antirépublicain dans ce que j'ai fait durant ces trois semaines de violences, ni durant mes trente ans de vie politique.
Sarkozy oublie qu'il a sciemment menti sur l'élément déclencheur des émeutes, à savoir la course poursuite des jeunes morts électrocutés dans le transformateur.
Vous parlez de la pratique de l'amalgame par les extrêmes. Justement, beaucoup de gens ont eu l'impression que la réponse du gouvernement à la crise des banlieues s'est faite sur la stigmatisation des étrangers. Durcissement des règles du regroupement familial, des mariages mixtes, du droit d'asile, dénonciation de la polygamie. Cela ne relève-t-il pas aussi de l'amalgame ?
Ce dont vous parlez, ce sont des déclarations qui, en ce qui me concerne, ont été faites bien avant les événements de banlieue. En aucun cas après. Je n'ai par ailleurs jamais parlé de la polygamie dans le cadre de ces événements. Je ne suis pas de ceux qui font le moindre amalgame entre les étrangers et les émeutes. Sur la question de l'expulsion des étrangers pris en flagrant délit de violences urbaines, ce n'est pas moi qui ai inventé la loi qui le permet. Et mon devoir c'est d'appliquer la loi.
Sur l'expulsion des étrangers, justement, est-ce que vous ne remettez pas en selle la double peine ?
Au contraire. J'ai fait voter la suppression de la double peine : 700 étrangers y ont échappé depuis. En l'occurrence, ce ne serait pas la double peine, mais ce serait la peine unique ! Soyons précis. Mais pourquoi ai-je évoqué à l'Assemblée nationale ma volonté d'appliquer la loi ? C'était pour mettre en garde les ressortissants étrangers contre une participation aux émeutes.
Sachant que très peu d'étrangers sont finalement concernés par cette menace, sur des centaines de personnes ayant participé à ces violences, n'est-ce pas une pratique de l'amalgame ?
Quand j'ai dit que je demanderais l'expulsion des imams qui font des prêches violents depuis le 1er janvier, on en a expulsé 21 ou 22 , cela ne veut pas dire que tous les imams font des prêches violents. De la même façon que le mot «racaille» ne visait pas tous les habitants de banlieue, mais seulement les voyous. Quand on a fait des sondages pour voir comment les habitants des banlieues avaient perçu ma manière de gérer la crise, ils pensaient exactement la même chose que moi. On a le droit de dire que la polygamie est interdite en France sans stigmatiser les étrangers. Votre comportement est un comportement d'ayatollah. Je parle de cette pensée unique qui conduit un certain nombre de gens à l'exaspération. Mais le débat, ce n'est pas cela. Vous, vous pouvez vous complaire dans des alliances avec le Parti communiste, avec l'extrême gauche, donner la parole à tous les extrémistes de la création. Ça, c'est bien, puisque c'est la pensée unique ! On ne peut plus rien dire dans notre pays sans qu'immédiatement on soit accusé d'arrière-pensées nauséabondes ! C'est la pensée unique qui est intolérable. Et je pense que c'est vous qui êtes coupés des réalités et de l'aspiration des gens. En interdisant aux républicains de parler librement, vous faites en vérité le lit du Front national.
Sarkozy se moque du monde. Sur la dalle à Argenteuil, il traite de racailles TOUS les jeune qui lui sont hostiles. C'est un bel amalgame !
On ne vous interdit pas de parler, vous avez sans arrêt la parole...
Vous êtes sectaires ! C'est d'ailleurs une partie de vos problèmes que ce décalage total entre le côté systématique de votre pensée et l'aspiration du plus grand nombre. Si j'ai des bons sondages, si les gens se reconnaissent dans la façon dont j'ai géré les banlieues, ce serait donc parce que le peuple est stupide ? Vous, vous avez toujours raison et c'est le peuple qui se trompe ? C'est formidable : ou bien les Français ne me suivent pas, et dans ce cas-là j'ai tort, ou bien ils me suivent, et dans ce cas-là ce sont les Français qui ont tort. Mais vous, vous avez toujours raison. C'est exceptionnel ! Vous ne doutez donc jamais ?
Le fait de répondre à un journaliste qu'il est sectaire parce qu'il dit la vérité. Quel respect ! Ensuite il répond à côté de la question en chargeant le déjà moribond journal Libération, qui si il n'est pas parfait, use parfois de la rape à bois ... (pour la langue !)
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La suite de cet intéressant entretien demain. Point trop n'en faut chaque jour, pour éviter une difficile digestion. La sarkosite est une maladie fort répandue, il ne faut pas favoriser son développement.